Les démarches administratives sont les piliers de chaque projet d’énergie solaire en Tunisie. Cela peut sembler fastidieux, mais il est essentiel de bien comprendre ces étapes pour mener à bien votre projet. Dans cet article, nous allons vous expliquer les étapes clés pour obtenir une installation solaire en Tunisie.
Le développement de l’énergie photovoltaïque en Tunisie s’inscrit dans une stratégie nationale ambitieuse visant à renforcer l’indépendance énergétique du pays. Face à une demande d’électricité en croissance rapide, avec une augmentation annuelle de 5% et des pics de demande atteignant 11% 1, la Tunisie a formalisé son engagement envers les énergies renouvelables. Ce cadre est principalement défini par la Loi N°2015-12 et le Plan Solaire Tunisien (PST), qui fixent collectivement un objectif de 30% (voire 35% selon certaines sources) de la production d’électricité issue de sources renouvelables d’ici 2030. Cet objectif inclut une capacité installée spécifique de 3 815 MW, dont 1 510 MW sont alloués à l’énergie photovoltaïque.1
La législation, notamment la Loi N°2019-47, a proactivement ouvert le secteur de l’énergie à l’investissement privé, créant un environnement dynamique et favorable aux projets solaires de diverses envergures.3 Cette orientation stratégique n’est pas seulement une démarche environnementale, mais une réponse fondamentale à un impératif de sécurité énergétique. La dépendance de la Tunisie vis-à-vis des importations d’énergie primaire (environ 40% des besoins) et l’escalade de la demande intérieure soulignent la nécessité critique de diversifier le mix énergétique et de renforcer l’autonomie. La promotion du photovoltaïque est ainsi une composante essentielle de la stratégie nationale pour la sécurité et la stabilité économique. L’implication du secteur privé est jugée cruciale pour accélérer cette transition et atténuer les risques liés à la dépendance énergétique. Cette base stratégique suggère que le cadre réglementaire, bien que potentiellement complexe, est susceptible de rester stable et favorable, voire d’évoluer pour inciter davantage les investissements, car le succès du secteur photovoltaïque contribue directement aux intérêts nationaux fondamentaux, offrant ainsi une base solide pour la viabilité à long terme des projets.
Le présent rapport a pour objectif de servir de guide exhaustif, démystifiant le paysage administratif et réglementaire qui régit l’installation et l’exploitation des panneaux photovoltaïques en Tunisie. Il vise à fournir des informations claires et exploitables aux particuliers, aux entreprises et aux développeurs de projets, couvrant l’ensemble du cycle de vie d’un projet, depuis les déclarations initiales et l’acquisition des permis jusqu’au raccordement au réseau, en passant par l’exploitation des incitations financières et le respect des obligations opérationnelles continues, tout en assurant une conformité totale avec les réglementations nationales.


Le Cadre Réglementaire et Institutionnel Tunisien
Le développement du secteur photovoltaïque en Tunisie est encadré par un ensemble de lois, de règlements et d’institutions clés qui définissent les procédures et les conditions d’installation et d’exploitation.
Fondements Législatifs Clés
La pierre angulaire de la politique tunisienne en matière d’énergies renouvelables est la Loi N°2015-12, promulguée en 2015, qui a fondamentalement autorisé l’accès du secteur privé à l’investissement dans la production d’électricité à partir de ressources renouvelables.2 Cette loi a été complétée et renforcée par la
Loi N°2019-47, qui a spécifiquement permis aux sociétés de projet privées de produire de l’électricité à partir de ressources renouvelables et de la vendre au secteur privé (en Moyenne Tension – MT).3 Le document stratégique global, le
Plan Solaire Tunisien (PST), fixe un objectif ambitieux d’atteindre 35% de l’électricité provenant de sources renouvelables d’ici 2030, avec une capacité installée globale de 3 815 MW, dont une part significative (1 510 MW) est dédiée à l’énergie photovoltaïque.
Principaux Régimes Réglementaires
Le paysage réglementaire est structuré en trois régimes distincts, conçus pour s’adapter aux différentes échelles et objectifs des projets 2 :
- Autoconsommation : Ce régime s’applique lorsque l’électricité produite est principalement destinée à la consommation propre de l’utilisateur. Des dispositions sont prévues pour l’injection de tout surplus d’électricité dans le réseau national.
- Autorisations via Appels à Projets : Cette voie est généralement destinée aux projets de plus grande envergure, impliquant souvent des appels d’offres compétitifs lancés par le Ministère de l’Industrie, des Mines et de l’Énergie. Des appels d’offres historiques ont abouti à l’attribution réussie de capacités pour des centrales photovoltaïques de 1 MW et 10 MW, illustrant un mécanisme structuré pour les projets significatifs.2
- Concessions via Appels d’Offres : Ce régime est réservé aux projets stratégiques de très grande envergure, impliquant des accords contractuels à long terme et des exigences de développement souvent plus étendues.
Institutions Centrales et Leurs Rôles
Plusieurs institutions jouent un rôle pivot dans la régulation et le soutien du secteur photovoltaïque :
- Ministère de l’Industrie, des Mines et de l’Énergie (MEMTE) : Ce ministère est l’autorité centrale responsable de la mise en œuvre du PST et de la régulation du secteur énergétique dans son ensemble. Il constitue l’organisme principal pour la délivrance des autorisations pour les projets de grande envergure (par exemple, ceux dépassant 1 MW de capacité).2
- Agence Nationale pour la Maîtrise de l’Énergie (ANME) : L’ANME joue un rôle multifacétique et crucial dans la promotion de l’efficacité énergétique et de l’utilisation de l’énergie solaire. Ses responsabilités incluent :
- L’octroi des autorisations préalables, notamment pour les installations ayant l’intention de vendre l’électricité excédentaire.5
- L’agrément des modules photovoltaïques, garantissant leur qualité technique et leur conformité.3
- La gestion des critères d’éligibilité et le décaissement des incitations du Fonds de Transition Énergétique (FTE) pour les projets d’autoconsommation, y compris la rédaction et la vérification des contrats de programme.2
- L’exploitation d’une plateforme numérique pour la gestion simplifiée des dossiers d’entreprise et la délivrance d’attestations de conformité technique.6
- L’exercice de droits de contrôle sur les installations et l’imposition de sanctions en cas de fraude confirmée ou de non-conformité significative aux normes réglementaires.7
- Société Tunisienne de l’Électricité et du Gaz (STEG) : En tant que service public national d’électricité et de gaz, la STEG est indispensable pour les projets photovoltaïques raccordés au réseau. Ses fonctions clés comprennent :
- Le traitement et l’approbation des demandes de raccordement au réseau pour toutes les installations connectées au réseau.8
- La réalisation d’études techniques pour assurer la conformité et déterminer les conditions de raccordement.8
- La délivrance d’attestations d’acceptation pour les onduleurs, garantissant leur compatibilité avec le réseau national.3
- La réception technique et la mise en service des systèmes installés.2
- La facilitation de l’achat de l’électricité excédentaire produite par les systèmes photovoltaïques.3
- L’administration de certaines incitations financières, notamment la composante crédit du programme PROSOL ELEC.2
- Organisations Internationales : Des entités telles que la Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit (GIZ) apportent une expertise technique et un soutien financier précieux, contribuant au développement du secteur.2
La structure réglementaire multi-niveaux (autoconsommation, autorisation, concession) associée au rôle central de l’ANME, à la fois dans l’approbation technique (modules, éligibilité des installateurs) et les incitations financières (FTE), témoigne d’une approche sophistiquée et centralisée de la gestion du secteur photovoltaïque.
Cette structure vise à différencier la supervision en fonction de l’échelle et de la complexité du projet, tout en assurant le contrôle qualité et l’alignement stratégique avec les objectifs énergétiques nationaux. La distinction entre les régimes correspond à la taille et à la portée du projet, et l’implication de l’ANME dans les normes techniques et le décaissement des incitations suggère une volonté de garantir que les projets soutenus sont à la fois techniquement solides et stratégiquement alignés.
Cette approche différenciée est une stratégie pragmatique pour équilibrer la facilité d’entrée sur le marché pour les installations à petite échelle et à faible impact (par exemple, l’autoconsommation résidentielle) avec une surveillance rigoureuse et des mécanismes concurrentiels pour les projets plus importants et plus complexes (par exemple, les parcs solaires à l’échelle des services publics).
Ce processus sur mesure évite une réglementation excessive des petits projets tout en garantissant que les investissements importants et les impacts potentiels sur le réseau sont minutieusement examinés. Le rôle intégré de l’ANME en tant que garant technique et facilitateur financier est crucial.
En approuvant les modules et les installateurs, l’ANME vise à maintenir des normes de qualité et de sécurité élevées dans l’ensemble du secteur, renforçant ainsi la confiance des consommateurs et des investisseurs. En gérant les incitations, elle s’assure que les fonds publics sont dirigés vers des projets conformes et efficaces qui contribuent véritablement aux objectifs énergétiques nationaux.
Ce contrôle centralisé minimise les risques d’installations non qualifiées et assure une allocation efficace des ressources. Pour les investisseurs potentiels, cela signifie que le parcours administratif est directement proportionnel à l’échelle du projet.
Alors que les petits projets bénéficient d’un processus relativement simplifié, les grandes entreprises rencontreront des exigences techniques plus strictes, des appels d’offres compétitifs et des niveaux de contrôle gouvernemental plus élevés.
Une compréhension claire de ces seuils est essentielle pour une planification précise du projet et pour éviter des retards importants ou des problèmes de non-conformité qui pourraient découler d’une mauvaise catégorisation.